La Tchéquie en bref...

Publié le par Cesky

L'histoire de la République tchèque est à la fois celle de la Bohême, de la Moravie et de la Tchécoslovaquie à partir de 1918. À partir du XIe siècle, les histoires de la Bohême et de la Moravie se confondent puisque c'est en 1029 que la Moravie fut rattachée à la Bohême.

Du Moyen Âge au XXe siècle

Les deux régions historiques avaient été peuplées dès le Ier siècle apr. J-C par des Slaves et avaient été évangélisées avant 800 par des missionnaires venus de la Bavière franque, spécialement des diocèses de Salsbourg, Passau et Ratisbonne, puis, en 863 et 864, par deux moines grecs, les frères Cyrille et Méthode. À la fin du IXe siècle, la Bohême est rattachée au royaume de Grande-Moravie sous le règne de Svatopluk (871-894), qui porte ce royaume à l'apogée de sa puissance politique et culturelle. En 894, à la mort de Svatopluk, la Grande Moravie connaît un brusque déclin en raison notamment des querelles permanentes qui déchirent la dynastie régnante. La Bohême et la Moravie sont séparées, et la Moravie est envahie par les Magyars emmenés par Arpad (896-907).

Le centre du pouvoir se déplace alors vers la Bohême, mieux protégée par sa position géographique. Le pouvoir des Premyslides, dont la dynastie s'est imposée à partir du Xe siècle, s'affirme et se consolide sous le prince Vaclav (Venceslas) (vers 921-935 ou 929). Celui-ci, confronté à une attaque du roi de Saxe et d'Allemagne, Henri Ier l'Oiseleur, devient son vassal, et se place également sous la protection du pape. Sa politique religieuse, qui porte un rude coup aux habitudes tribales et païennes en vigueur et renforce la puissance du souverain, suscite de vives tensions qui culminent avec la lutte fratricide qui oppose Venceslas à Boleslav, et s'achève en 935 par l'assassinat de Venceslas et le massacre de ses partisans avec leurs familles. Le souverain martyr, canonisé par l'Église à la fin du Xe siècle, devient le saint patron de la Bohême. Ses successeurs poursuivent son œuvre, limités toutefois dans leur volonté d'expansion, d'une part par le Saint Empire romain-germanique auquel le royaume de Bohême appartient et qui intervient souvent en cas de discorde au sein de la dynastie, mais qui laisse aux souverains de Bohême leur souveraineté, et d'autre part par la montée en Pologne du pouvoir de la dynastie des Piast.

Le règne de Boleslav Ier (v. 935-972), qui débute par une guerre de quatorze ans avec l'empereur germanique Othon Ier — dont il devient ensuite le vassal —, est marqué par l'édification d'un état féodal modernisé, avec la frappe de la monnaie et la préemption de l'impôt. En outre, Boleslav Ier mène une politique d'expansion qui lui permet d'étendre les frontières de sa principauté à la Moravie, la Silésie, à une partie de la Vistule, et même à la Slovaquie occidentale. En 973, Boleslav II (972-999) obtient du pape la fondation d'un évêché à Prague, dont, en 982, Vojtech (Adalbert), qui appartient à la famille des Slavnikides, devient l'évêque par la volonté du prince.

Les ambitions des Premyslides se heurtent bientôt à celle des Slavnikides, maîtres de l'est de la Bohême, de la Moravie du Nord, de la Croatie blanche dans la région de Cracovie, et qui se rapprochent des Polonais. Après leur élimination, en 995, par Boleslav II, le pouvoir se concentre entre les mains des Premyslides. Lors de la querelle des Investitures (1075-1122), les princes tchèques affirment leur fidélité aux empereurs et, en 1089, Vratislav II (1061-1092) reçoit le titre de roi à titre personnel des mains de l'empereur Henri IV. Le XIIe siècle marque le début d'une décadence politique due à une série de querelles de succession ; cependant, en 1198,sous le règne d'Otakar Ier (1198-1230), la couronne devient héréditaire dans la famille des Premyslides. La Bulle d'or de Sicile de l'empereur Frédéric II consacre en 1212 l'indépendance du domaine des Premyslides. Venceslas Ier (1230-1253) est couronné à Prague par l'archevêque de Mayence et reçoit l'investiture de l'empereur allemand.

Premysl Otakar II (1253-1278) porte la puissance de la Bohême à son apogée. Il annexe la Carinthie, la Styrie et la Carniole, élargissant le royaume jusqu'à la mer Adriatique. Prenant part à la croisade des Chevaliers teutoniques en Prusse (1255), il fonde Königsberg (Kaliningrad); il entreprend également une lutte pour le trône du Saint Empire, mais en est écarté par les électeurs au profit de Rodolphe Ier de Habsbourg. Au terme de la guerre qui s'ensuit, il perd toutes ses conquêtes dans la région des Alpes avant d'être tué l'empereur en 1278. La dynastie des Premyslides, qui prend fin avec l'assassinat de Venceslas III (1305-1306) par un noble d'Olomouc, est remplacée en 1310 par celle des Luxembourg.

Au XIVe siècle, le royaume de Bohême, agrandi, connaît une nouvelle époque de splendeur. C'est aussi durant ce siècle qu'est fondée l'université de Prague (1348). Sous les règnes de Charles IV (1346-1378), de Venceslas IV (1378-1419) et de Sigismond de Luxembourg (1419-1437) la Bohême connaît le mouvement de réforme dirigé par Jan Hus (delui-ci, qui entendait donner une application pratique à un certain nombre d'idées de Wycliffe qu'il reprenait à son compte, sera finalement condamné à être brûlé vif par le concile de Constance, le 6 juillet 1415), qui conduit à une crise religieuse et sociale, puis à la guerre civile. À l'issue de cette guerre, après la défaite de la Montagne-Blanche (8 novembre 1620), la couronne quitte la dynastie des Luxembourgs pour échoir aux Habsbourg, qui la conserveront jusqu'en 1918. En 1618, les nationalistes protestants se soulèvent contre la politique de germanisation et le non-respect de la politique religieuse: c'est le début de la guerre de Trente Ans. Des émeutes se produisent à Prague en 1848, comme dans le reste de l'Europe. De 1848 à 1916, sous le règne de l'empereur François-Joseph, deux courants concernant l'affirmation de l'identité slave s'affirment: d'une part l'austro-slavisme, d'autre part le néo-slavisme favorable au séparatisme.

Profitant de la défaite des puissances centrales, les Tchèques déclarent leur indépendance le 28 octobre 1918, suivis le 30 par les Slovaques : ils se retrouvent ainsi unis au sein d’un même pays. Sous l’égide de son premier président Tomáš Garrigue Masaryk (qui avait été à la tête du mouvement de libération tchécoslovaque et qui est une des personnalités intellectuelles les plus fortes du monde tchèque), la Tchécoslovaquie se développe rapidement en une démocratie parlementaire qui fonctionnera de façon satisfaisante jusqu’à sa mise en cause de l’extérieur. Cette Première République bénéficie d’un fort potentiel économique, d’un idéal démocratique conforté par ses dirigeants, de classes moyennes solides et d’un niveau culturel élevé. En revanche, elle souffre de plusieurs handicaps : d‘importantes minorités (un tiers de sa population), une forte dépendance économique et financière et une position géostratégique délicate. La crise économique mondiale va déséquilibrer l’État en radicalisant ses forces centrifuges, notamment les Allemands des Sudètes et une partie des Slovaques. Ainsi s’achèvera une période que beaucoup de Tchèques considèrent comme un âge d’or, dans une histoire très troublée.

En septembre 1938, l'Allemagne revendique les districts tchécoslovaques des Sudètes où les Allemands constituaient une majorité d‘après le recensement de 1910. La France, la Grande-Bretagne et l'Italie accèdent aux demandes d‘Adolf Hitler en échange d’une très hypothétique promesse de paix à la conférence de Munich; sans illusions, mais soumis à une pression très forte de ses alliés, le président Eduard Beneš, successeur de Masaryk, cède. Six mois plus tard, en mars 1939, Hitler s'empare du reste de la Tchécoslovaquie, donnant raison à Benes et à ceux qui refusaient Munich. La Bohême et la Moravie sont placées sous protectorat du Troisième Reich tandis qu’un État cléricalo-fascisant dirigé par Mgr Tiso est créé en Slovaquie, sous l’égide de Berlin. Les Pays tchèques vont ainsi connaître plus de six années d’occupation, l’extermination de ses populations juive et tsigane, et de lourdes pertes dans ses élites.

 

Après la défaite de l'Allemagne nazie, la Tchécoslovaquie retrouve en 1945 ses frontières de 1938, à l'exception de la Ruthénie subcarpatique, cédée à l'URSS dans des conditions qui auguraient mal des relations soviéto-tchécoslovaques, même si, depuis le mois de décembre 1943, des liens privilégiés ont été établis avec Moscou. Déçu par les puissances occidentales, Beneš, qui a dirigé le mouvement de libération tchécoslovaque à l'étranger, a renversé ses alliances. Comme tant d’autres, il croit à une Union soviétique transformée. Mais sa marge de manoeuvre se réduit au fur et à mesure que monte la guerre froide. En février 1948, à la suite du coup de semonce de Moscou donné lors de l’automne 1947, le Parti communiste s'empare du pouvoir, sans effusion de sang. Affaibli par la maladie, Beneš démissionne avant d’être remplacé à la présidence par Klement Gottwald, alors chef du Parti communiste tchécoslovaque. Sous Gottwald et ses successeurs Antonín Zapotocký et Antonín Novotný, la Tchécoslovaquie devient un état satellite de l'Union soviétique. Planification totale, industrialisation massive, mobilisation de toutes les forces de production, contrôle global de la société et répression caractérisent la première décennie du pouvoir communiste. Lors de la seconde moitié des années 1950 et surtout au début des années 60, un vent nouveau se lève où se mêlent la contestation et les premières velléités de réforme. En janvier 1968, le Slovaque Alexander Dubček remplace Novotný à la tête du Parti communiste, puis en mars, Ludvík Svoboda succède à ce dernier à la présidence de la République. S’amorce une libéralisation de plus en plus marquée, le fameux « Printemps de Prague », qui voulait instaurer un « socialisme à visage humain ». Une grande partie de la population eut alors un sentiment de proximité avec des élites politiques qui étaient à son écoute. La parole était libre, l’individu était à nouveau replacé au centre des préoccupations. La Tchécoslovaquie tentait d’inventer un nouveau modèle socialiste. Une telle perspective était inacceptable pour une grande partie des forces du bloc soviétique. Après de longues hésitations entre mars et août 1968, dans la nuit du 20 au 21, les troupes du Pacte de Varsovie envahissent la Tchécoslovaquie pour empêcher que ne se tienne le XIVe Congrès extraordinaire, qui aurait assuré le triomphe du courant réformateur. Réussite militaire - désormais la Tchécoslovaquie sera un pays occupé -, échec politique. Jusqu’au printemps 1969, la Tchécoslovaquie vit dans l’ambiguïté d’un éventuel sauvetage d’une partie des acquis du „Printemps“.  Mais en avril, le remplacement de Dubček par Gustav Husák sonne le glas des espoirs. Husák sera l’homme de la „normalisation“ du pays et de l’application de la doctrine Brejnev de souveraineté limitée. La répression commence, et avec elle le début d‘une vague d'émigration sans précédent. En 1977, plusieurs centaines de citoyens tchécoslovaques signent un manifeste nommé Charte 77, et réclament l’exercice des libertés individuelles en Tchécoslovaquie en s’appuyant sur les traités d‘Helsinki. Malgré les persécutions, la dissidence et la contestation vont s’amplifier dans les années 1980. Cependant la politique intérieure tchécoslovaque demeure très répressive et ne suit pas la perestroïka lancée par Gorbatchev.

Depuis 1989

Il faut attendre le 17 novembre 1989, alors que l’impatience de la population ne cesse de monter, pour que la contestation prenne un caractère massif. Comme en RDA, des centaines de milliers de manifestants descendent quotidiennement dans les rues pour revendiquer la liberté : la direction du Parti communiste, remaniée, est contrainte d’engager des négociations avec les représentants du Forum civique (dirigé par Václav Havel), qui regroupe les opposants au régime. Fin novembre 1989, des ministres non communistes font leur entrée au cabinet. En décembre, l'Assemblée Nationale porte Alexander Dubček à sa tête et élit l'écrivain et dramaturge Václav Havel au poste de président. C’est la fin du monopole du pouvoir du PCT et le début du renouveau démocratique. C’est aussi le remembrement de la culture tchécoslovaque jusque-là divisée entre exil, dissidence et officialité.

 

Une démocratie parlementaire se met en place, avec une Chambre des députés élue pour quatre ans à la proportionnelle, une présidence aux pouvoirs réduits, un large éventail de partis. Les premières élections législatives sont organisées en juin. C’est un triomphe du Forum civique (et du Mouvement contre la violence en Slovaquie). Le nouveau pouvoir a à faire face à d’énormes problèmes : la mise en place des institutions politiques, la transformation de la propriété, le passage à une économie ouverte, l’apurement du passé, la définition d’une nouvelle politique internationale, le règlement des rapports slovaco-tchèques.

 

C’est ce dernier point qui, dans l’immédiat, suscitera les plus grandes difficultés puisque les négociations aboutiront en 1992 à une séparation de „velours“, mettant fin à 74 ans de vie commune. Ainsi la République tchèque voit-elle le jour le 1er janvier 1993 alors que la Slovaquie accédait pour la première fois à une véritable indépendance. Les deux pays gardent cependant des liens privilégiés, le sentiment de proximité n’a jamais disparu.

 

Dans le cadre de la République tchèque, le président Václav Havel, réélu en 1993 et 1997, est président jusqu’en 2002. Les élections législatives de 1992 et 1996 ont confirmé le parti libéral de Václav Klaus, l’ODS, dans sa position dominante. Mais les élections anticipées de 1998, après l’intermède d’un cabinet de techniciens, ont amené au pouvoir le parti social-démocrate de Milos Zeman, premier Ministre jusqu’en 2002, à la tête d’un gouvernement minoritaire qui exerce ses fonctions avec le soutien négocié de l‘ODS.

 

Sur le plan de sa politique extérieure, la République tchèque a fait le choix de l’Occident en postulant à l’adhésion à l’OTAN (réalisée en mars 1999) et à l’Union européenne (1 mai 2004). Il en est de même pour sa politique économique et pour ses échanges commerciaux qui ont lieu très majoritairement avec l’Europe occidentale.

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